Histoire des Galeries Lafayette

Hérité du fonctionnement des corporations, le commerce de détail est encore au début du XIXème siècle organisé en boutiques spécialisées cloisonnées par catégories de produits. Chapeaux, souliers, tissus, l’élégante doit parcourir un grand nombre de lieux pour constituer sa garde-robe. Avec la création des grands magasins au milieu du XIXe siècle s’amorce une mutation des pratiques de vente et d’achat. Ces nouveaux formats de commerce permettent de regrouper pour la première fois sous le même toit tout ce qui est nécessaire à la toilette féminine : accessoires et colifichets, rubans, dentelles, formes de chapeaux, etc. Ils rencontrent rapidement un grand succès auprès des clientes, et permettent à une partie moins aisée de la population d’accéder à une forme de consommation jusqu’alors inaccessible.

À l’origine d’une révolution commerciale, le grand magasin conduit également à de nombreuses innovations comme l’entrée libre, le prix fixe et affiché, la possibilité d’échanger, les soldes et même la vente par correspondance.

En observateur attentif, Emile Zola décrit le processus de transformation du magasin de nouveautés, innovation commerciale de la première moitié du XIXème siècle, en grand magasin. Le propriétaire d’un commerce prospère reprend progressivement les baux de petits commerces mitoyens qui subissent directement sa concurrence.

Aux Galeries Lafayette suit fidèlement ce schéma. Les fondateurs des Galeries Lafayette, deux cousins alsaciens, Théophile Bader et Alphonse Kahn, créent une société en 1893 pour reprendre l’exploitation d’une modeste mercerie de 70 m2 située au 1 rue Lafayette. En 1896, ils sont déjà propriétaires de tout l’immeuble, et à partir de 1904 ils commencent leur expansion sur le bd Haussmann. De 1906 à 1908, une première campagne de travaux menée sous la direction de l’architecte Georges Chedanne, aménage à destination commerciale les acquisitions de l’îlot du 38-40-42 Bd Haussmann et 15 rue de la Chaussée d’Antin.

Portées par leur succès commercial, les Galeries Lafayette continuent leurs acquisitions des parcelles de l’îlot délimité par le Boulevard Haussmann, les rues de la Chaussée d’Antin, rue de Provence et rue Mogador. A peine inauguré le bâtiment de Georges Chedanne, et suite à un contentieux relatif aux honoraires de ce dernier, dès 1909, de nouveaux travaux d’agrandissement sont confiés à Ferdinand Chanut, élève de Chedanne. Ferdinand Chanut se voit confier la construction d’un bâtiment en cœur d’îlot composé de quatre halls, dont un avec une coupole monumentale, qui constituent autant de puits de lumière.

L'architecture commerciale
Les immeubles de rapport haussmannien, territoires conquis pour agrandir les surfaces de vente, doivent alors subir un changement de destination qui nécessite des réaménagements importants. Toutes ces transformations sont rendues possibles par les avancées techniques, notamment l’architecture métallique, et dès le début du XXème siècle l’utilisation du béton armé.

Le plus caractéristique dans cette nouvelle architecture commerciale est la place faite aux espaces non marchands (salons de lecture, salons de correspondance, organisation de concerts, défilés de mode...). Autant d’espaces de socialisation auxquels il faut ajouter les salons de thés. Le grand magasin devient un lieu de vie où les clients passent de plus en plus de temps, et le shopping une activité de loisirs.

Dans ce nouveau dispositif, la décoration et l’agencement du magasin deviennent essentiels dans la théâtralisation du lieu de vente et la mise en scène de la marchandise.

Les contributions majeures de Jacques Gruber et Louis Majorelle aux agrandissements
inaugurés à l’automne 1912 donnent toute son âme au lieu. L’ensemble constitué par la
coupole, l’escalier d’honneur et 20 ascenseurs est au centre d’un dispositif qui modifie la circulation traditionnelle des grands magasins. La conception du grand hall substitue à une circulation linéaire -comptoirs disposés parallèlement dans des galeries- un schéma circulaire dont la coupole et l’escalier constituent l’axe.

En 1932, le magasin se modernise grâce à des lignes géométriques et une architecture imposante de style Art déco.

Pierre Patout est responsable de la troisième partie des agrandissements du magasin. Architecte de paquebots transatlantiques, il donne au magasin la silhouette d’un de ces navires partant pour les Etats-Unis. La presse évoque encore régulièrement le navire amiral du boulevard Haussmann.

Ce mouvement artistique, qui s'exprime à travers l'architecture, le design, la mode et les arts décoratifs, se caractérise par des motifs stylisés et une palette de couleurs riches. Inspiré par les avancées technologiques de l'époque et les influences du cubisme, du futurisme et des arts primitifs, l'Art Déco reflète un désir d'innovation tout en célébrant le luxe et le raffinement.